Peut-être que la mocheté, ça fait mûrir – Les Petites Reines
Considéré comme l’un des meilleurs livres jeunesse en 2015, les Petites Reines de Clémentine Beauvais fait partie de ces oeuvres qui ont plusieurs degrés de lecture. Et c’est avec finesse, humour et élégance que Justine Heynemann met en scène une histoire qui est d’abord le périple de jeunes filles en quête d’elles-mêmes.
On ne naît pas Petites Reines, on le devient
Mireille (flamboyante Manon Combes) Hakima (Justine Bachelet) et Astrid (Barbara Bolotner) sont trois adolescentes qui viennent d’être nommées « Boudins de l’année » sur Facebook par leurs camarades de lycée. Un peu enveloppées, introverties ou simplement pas aussi populaires que leurs amies, les jeunes filles se lient d’amitié et décident de ne pas se lamenter sur leur sort. Elles seraient les Boudins dont on parlerait le plus en France et se lancent ainsi dans un périple à vélo pour rejoindre la Garden Party de l’Elysée depuis… Bourg-en-Bresse.
Dans cette pièce qui aurait pu tourner à la série de clichés pour pré-adolescentes, Justine Heynemann propose une double lecture particulièrement intéressante. Au-delà de la critique émouvante des discriminations de jeunes femmes est proposée une vraie réflexion sur la féminité et la liberté. Et c’est paradoxalement via un corps masculin mutilé (superbe Sylvain Sounier) que les plus belles scènes ont lieu car le féminisme se conjugue aussi au masculin.
La place des médias est en outre particulièrement bien interrogée. Car les héroïnes embarquent pour un road-trip français suivi par des milliers de followers et des journalistes peu scrupuleux. Dans un mélange amer d’insultes, de soutien et face à la lâcheté toujours grandissante des réseaux sociaux se positionnent trois adolescentes en quête de liberté.
« Pour chaque fois où une personne dit qu’on est géniales, fortes, intelligentes et combatives, il y en a une autre sur un réseau social quelque part qui s’applique à écrire qu’on est des grosses connes moches, des laiderons, des putes, des pouffiasses et des salopes, des sales connasses, moches comme des culs, moches comme des truies. Qui sont ces gens ? Le mystère reste entier. Y a-t-il des personnes qui existent, qui vivent, qui mangent, qui rient et qui dansent, derrière ces ahurissantes insultes ? »
Il y a la liberté de vivre, la liberté d’être ce que l’on est au-delà des diktats des médias ou de la mode, la liberté d’aimer et d’être aimée, la liberté de découvrir une vérité différente et celle d’être avec ceux qui nous sont les plus chers.
Drôle, fraîche, portée par une mise en scène vitaminée, une scénographie intelligente et des comédiens particulièrement justes, Les Petites Reines est une petite pépite de bonne humeur. Un régal.
Avis : ★★★★
Les Petites Reines, mise en scène Justine Heynemann, Théâtre Paris-Villette
du jeudi 8 février 2018 au dimanche 11 février 2018
Mes autres critiques :
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3 Comments
[…] Les Petites Reines […]
23/07/2018 at 23:41[…] Les Petites Reines […]
27/07/2018 at 23:40[…] espagnole dépassent hélas assez peu Don Quichotte. Justine Heynemann, déjà repérée avec Les Petites Reines, s’attaque avec La Dama Boba à un monument de la dramaturgie espagnole dans une mise en […]
08/02/2019 at 17:20