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Electre / Oreste bestial à la Comédie-Française

« Je suis bien un sacrilège, car j’ai tué ma mère, on doit  / Me qualifier aussi d’homme pieux, car j’ai vengé mon père. » Electre / Oreste

 

Les Damnés d’Ivo van Hove avaient laissé une mare de sang sur la scène du Palais des Papes d’Avignon mais également, depuis plusieurs saisons, sur la scène de la salle Richelieu à la Comédie-Française. De retour dans la maison de Molière avec Electre / Oreste, il présente, dans une version moderne et glaçante, le tragique dans son acception la plus bestiale.

Electre / Oreste, bestialité humaine

En associant ces deux pièces d’Euripide, Ivo van Hove permet de redonner un sens plus global à cette fratrie unie d’abord dans la vengeance et la violence. Electre et Oreste sont frère et soeur et tous les deux vont mettre en place stratégème pour assassiner Clytemnestre, leur mère, ainsi que son amant Egisthe. Et la grande force de ce texte ancien, c’est sa capacité à dire la folie. Après un matricide, Oreste devient fou et ils sont tous les deux pourchassés dans la cité.

Comme à leur habitude, les comédiens du Français sont bouleversants. Suliane Brahim est une Electre époustouflante, hantée, damnée elle aussi. Christophe Montenez nous offre une nouvelle plongée dans l’étonnante palette de jeu qu’il possède, oscillant toujours entre une grande sensibilité et une grande fureur. Le mélange parfait pour faire de cette folie individuelle une décadence collective.

 

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Les comédiens sont englués dans un plateau recouvert de boue, comme pour rappeler la nature primitive de la pièce et toute la mise en scène tourne autour de cette terre qui colle, qui salit et qui enterre. Symbole de fertilité potentielle comme de misère absolue, il n’y a que ce bloc de béton au milieu (bloc qui n’est pas sans rappeler nos propres blocs et/ou le monolithe de 2001 l’Odyssée de l’Espace.) qui synthétise la violence qui ne peut pas être montrée. Les meurtres auront toujours lieu entre ces quatre murs.

Cela n’empêche pas à la violence de s’exprimer avec fracas dans la pièce. Emasculation, danses primitives et torrents de sang se succèdent pendant deux heures, à tel point que l’on se demande s’il n’y a pas un abus d’effets.

 

Cette quête de primitivité, à cheval entre l’époque antique et notre époque (en témoignent les costumes), est poussée tellement loin qu’elle finit par perdre un peu le spectateur. Si certaines scènes glacent littéralement le sang, la mise en scène a le défaut d’accentuer un texte qui parle déjà beaucoup. En forçant un trait déjà gras, on finit par étouffer non pas d’horreur, mais de lourdeur et c’est dommage. L’arrivée d’Apollon, à cet égard, tourne presque au ridicule.

Electre / Oreste est donc une pièce forte, violente, à la mise en scène à la fois recherchée et chargée. Une création curieuse, réussie mais qui laisse un pavé dans l’estomac.

 

Avis : ★★★

Electre / Oreste, mise en scène d’Ivo van Hove, Comédie-Française 

Jusqu’au 3 juillet 2019

 

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